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CSRD, ESRS & IFRS-S : pas les mêmes lettres mais la même passion
De nouveaux sigles mais toujours la même trajectoire.
Bienvenue dans le septième numéro de 55 degrés à l’ombre, la newsletter qui décrypte l’actualité des entreprises face aux enjeux climatiques.
Au menu :
du réglementaire plein de sigles : la bataille des standards de reporting extra-financier ;
la biodiversité gagne du terrain dans les analyses de l’immobilier durable ;
les effets positifs pour le climat de la loi Biden contre l’inflation aux Etats-Unis ;
le tableau de bord du Secrétariat Général à la Planification Écologique ;
des photos pour illustrer le changement climatique dans toutes ses dimensions ;
le CEA montre l’exemple avec son nouveau magazine à 389 gCO2e ;
World Rugby définit sa Stratégie Environnementale 2030 ;
engager le dialogue avec des experts du climat lors de BIG ;
une formation à la comptabilité carbone.
Bonne lecture !
L’équipe de Magelan
Édito
Si Emmanuel Macron a appelé à « une pause réglementaire en Europe » en mai dernier, l’effervescence — parfois la panique — a pris place dans les entreprises. Nombreuses d’entre elles sont concernées par de nouvelles réglementations, notamment la CSRD, et doivent apprendre à réaliser des tâches qu’elles n’ont jamais réalisées par le passé. Un contexte qui peut rappeler celui de l’instauration du premier plan comptable général adopté en 1943.
À l’heure de la crise environnementale (climatique, biodiversité, etc.) que nous traversons, il nous semble plus que nécessaire de généraliser ces nouvelles pratiques et ces nouveaux réflexes pour appréhender et limiter nos pressions sur l’environnement.
Nous parlions de l’évolution de la taxonomie européenne dans un épisode précédent, nous avons maintenant choisi de vous expliquer les nouveaux sigles du moment : IFRS-S ou ESRS.
Gardons à l’esprit que le climat, lui, ne répond qu’aux lois de la physique. Il nous semble donc important de continuer à modifier nos pratiques en entreprise (énergie, déplacements, achats, etc.) tout en soutenant ces évolutions des règles du jeu, censées les accélérer.
Comprendre
Du nouveau dans le reporting extra-financier
L’ISSB étend les normes de publications internationales IFRS à l’environnement. L’International Sustainability Standards Board a été créé lors de la COP26 de Glasgow (2021) pour faciliter le reporting d’informations extra-financières des entreprises. Son modèle ? Les référentiels comptables internationaux IFRS proposés au début des années 2000, devenus une norme internationale.
La publication des standards IFRS-S1 et IFRS-S2 (S pour sustainability) par l’ISSB au mois de juin est un premier pas vers la simplification du reporting extra-financier. En « traduisant en langage comptable » les risques et opportunités liés au changement climatique, ces nouveaux standards doivent permettre aux entreprises et aux investisseurs de prendre en compte les enjeux climatiques dans leurs décisions stratégiques, au même titre que des informations financières.
Comme le résume Emmanuel Faber, président de l’ISSB :
Les normes ont été conçues pour aider les entreprises à présenter leur situation en matière de durabilité d’une façon rigoureuse, comparable et auditable.
La Commission européenne adopte les European Sustainability Reporting Standards (ESRS). Du côté européen, la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) entrera en vigueur en 2024 à l’échelle européenne pour obliger plus de 50 000 entreprises à publier un reporting extra-financier. Cette directive s’appuie elle aussi sur des critères de reporting harmonisés, détaillés dans un projet d’acte délégué adopté en juin : les European Sustainability Reporting Standards (ESRS). Comme les IFRS-S, les ESRS définissent un cadre de reporting (ce qu’une entreprise doit présenter dans son reporting extra-financier) et une manière de le faire (les données nécessaires, la manière de les présenter, etc.). La particularité de ce projet tient à la prise en compte de la double matérialité : les entreprises doivent présenter les conséquences que l’environnement peut avoir sur leur activité, mais également leur propre empreinte sur l’environnement. Peu d’activités pouvant se targuer de n’émettre aucun gaz à effet de serre, les ESRS vont améliorer de facto la photographie de l’empreinte des entreprises.
Alors, IFRS-S ou ESRS ? Vous avez du mal à voir comment ces deux standards s’articulent ? Youmatter résumait les enjeux de cette « bataille » pour la standardisation du reporting ESG dans un article publié il y quelques mois : « pour simplifier, disons que [ces organisations] entendent en ce moment définir les normes de reporting extra-financier du secteur privé [et] ont pour objectif de créer un référentiel, qui, si possible, deviendrait mondial ». Alors quelles différences existent entre ces normes, et quel standard retenir ? Selon le même article, les ESRS incarnent actuellement la proposition la plus ambitieuse, car ils sont les seuls à imposer aux entreprises de présenter la double matérialité de leur activité. Les prochaines années nous diront quel standard a pris le pas sur les autres et s’est imposé comme langage commun à l’international…
L’outil Bat-ADAPT analyse l’influence des bâtiments sur la biodiversité
Bat-Adapt, développé en 2020 par l’Observatoire de l’immobilier durable (OID), est un outil d’analyse de vulnérabilité climatique, permettant d'obtenir un diagnostic de résilience pour les bâtiments — rien à voir avec Gotham City donc. En indiquant quelques caractéristiques du bâtiment (matériaux, type de construction, etc.) et sa localisation, Bat-ADAPT permet d’estimer les risques climatiques à échelle 2030, 2050, 2070 et 2090 et propose des actions d’adaptation.
Dans sa dernière version, l’outil va intégrer des indicateurs portant sur la biodiversité
: des mesures de la qualité des écosystèmes pour identifier les risques de perturbation de la biodiversité dans la zone choisie (espèces à enjeu de conservation, zones protégées) et les pressions déjà en place (urbanisation, espèces exotiques envahissantes, etc.). Un signe positif quant à la prise en compte croissante de ce sujet, souvent minimisé face à l’ampleur du réchauffement climatique.Comment l’Inflation Reduction Act sert les objectifs climatiques des États-Unis
Selon différents modèles, il est très probable que l’Inflation Reduction Act (IRA), adopté par le gouvernement de Joe Biden l’été dernier, permette aux États-Unis de se rapprocher de leur objectif de baisse d’émissions de gaz à effets de serre d’ici 2030. En encourageant notamment le déploiement des énergies renouvelables, la baisse de production de charbon, et l’électrification des transports via des crédits d’impôts, l’IRA pourrait permettre de réduire les émissions américaines de -25% à plus de -35% par rapport à 2005.
L’article rappelle néanmoins qu’au-delà des modélisations présentées dans l’article de CarbonBrief, les effets de l’IRA dépendront de différents facteurs sociaux et politiques : les taux d’adoption des énergies propres, les choix des producteurs et des ménages, et les priorités des acteurs politiques.
Le tableau de bord du Secrétariat général à la planification écologique
Le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) a publié son tableau de bord, qui présente les objectifs à atteindre en matière de réduction d’émissions de CO2 et les leviers d’actions du plan de décarbonation 2030. On y trouve par exemple les émissions annuelles déclinées par secteurs (transports, agriculture, bâtiments…), la part des véhicules électriques dans le parc total, la quantité d’énergie produite par biogaz, le taux de chargement des poids lourds, ou encore le nombre de rénovations effectuées chaque année.
Ces premiers indicateurs seront progressivement complétés pour intégrer d’autres enjeux comme la biodiversité ou l’adaptation, et déclinés pour les territoires ultra-marins, aujourd’hui non présentés faute de données fiables.
S’inspirer
Le CEA montre l’exemple avec son nouveau magazine à 389 gCO2e
Le CEA a mené une démarche de mesure de l’empreinte carbone et d’éco-conception de son magazine scientifique. Tout ceci est parfaitement documenté sur le site du CEA. Les bonnes pratiques retenues : des choix graphiques pensés pour limiter la quantité d’encre (ex : moins d’aplats de couleurs, moins de photographies), un papier recyclé en France ou encore un volume volontairement réduit au plus juste. Une version numérique et intégrale de cette revue est accessible à chacun via le site du CEA.
World Rugby définit sa stratégie environnementale 2030
L’instance s’est dotée d’une feuille de route relativement claire et aboutie, qui s’illustre en ce moment avec la coupe du monde en France. On a ainsi pu observer les All Blacks prendre le train de Lyon vers Paris, ce qui est une pratique exemplaire (même si elle ne leur a pas permis d’éviter la défaite au Stade de France). L’organisation souhaite ainsi que 70 % des déplacements des équipes soient effectués en train. Le déplacement des visiteurs reste le point majeur à améliorer, comme le souligne l’excellente étude de nos confrères de Sami.
Les citations qui tournent dans nos têtes
100 00 ans pour que la terre se réchauffe de 5ºC. Au rythme actuel, on aura pris 3°C en 150 ans.
Magali Reghezza, géographe et ancienne membre du Haut conseil pour le climat (source)
1 kg de CO2 émis entraîne la fonte d'environ 15 kg de glace de glaciers.
Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue et coprésidente du groupe nᵒ 1 du GIEC (source)
Agir
Engager le dialogue avec des experts du climat lors de BIG
Venez parler climat au salon BIG, organisé par Bpifrance le 5 octobre ! Le « plus grand rassemblement business d’Europe » bénéficie à son tour de la mue de Bpifrance en banque du climat : une trentaine de présentations et conférences sur la journée seront consacrées aux enjeux climatiques appliqués au monde de l’entreprise.
Comment intégrer la biodiversité à son activité, sensibiliser ses fournisseurs pour des achats plus responsables, développer l’économie circulaire, éviter de faire des nouveaux usages de l’IA une bombe climatique…
On vous conseille au passage de guetter la présentation de notre étude sur la décarbonation du scope 3 pour les PME-ETI, présentation qui sera assurée par Raphaël Linois, consultant chez Magelan. La conférence de Raphaël sera diffusée en ligne, de 10 h 45 à 11 h 30, le 05 octobre prochain.
Une formation pour apprendre à faire un bilan carbone en autonomie
Nous vous en parlions dans la précédente édition de cette newsletter : après le succès de la première promotion, nous lançons fin septembre la deuxième édition de notre programme de formation à la comptabilité carbone, via La Roadmap du climat.
Pour mémoire, le programme de formation se déroule sur 4 semaines, en alternant des présentations théoriques et des cas pratiques (enjeux et contexte d’une démarche bilan carbone, cadrage d’un projet et analyse des flux, tableur d’émissions, sources de données), qui permettent de s’approprier le calcul carbone et de pouvoir se lancer au niveau de son entreprise.
La prochaine promotion débutera le 26 septembre, avec une prise en charge possible par Qualiopi. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de la Roadmap du climat.
Les indicateurs sont déjà visibles sur le site de l’OID même s’ils ne sont pas encore pris en compte dans les analyses.